Après trois jours de tables rondes et de débats entre acteurs politiques et financiers, les travaux de la conférence de l’Union africaine sur la dette publique en Afrique ont pris fin ce 14 mai 2025 avec la « Déclaration de Lomé » qui annonce une nouvelle stratégie africaine commune pour une meilleure gestion de la dette.
« L’Agenda africain de gestion de la dette publique : restaurer et préserver la viabilité de la dette » : c’est le thème au centre des échanges qui ont permis aux participants venus de tous les coins du continent de mener des réflexions poussées sur la problématique majeure des économies africaines avec un accent particulier sur la question de la dette.
Les participants ont évoqué certaines contraintes et la nécessité de revoir les accords de financement avec les partenaires financiers avec surtout la baisse du coût des crédits.
« Nous pouvons dire que la conférence de Lomé, a relevé deux types de contraintes concernant la dette africaine : La première contrainte est propre aux pays africains. D’abord chaque pays devra faire des efforts, puisque les débats ont porté sur l’assainissement des cadres macroéconomiques, la consolidation budgétaire de nos États. Donc chaque pays devra faire un effort pour assainir le cadre macroéconomique et parvenir à la consolidation budgétaire », a expliqué Georges Barcola, ministre togolais de l’économie et des finances.
« Mais l’autre contrainte aussi se situe au niveau de nos institutions financières régionales qui doivent aussi faire un effort pour accompagner nos pays en mobilisant davantage des ressources concessionnelles. Les ressources concessionnelles, comme vous le savez, permettent de faire des recours à la dette, mais qui pèsent moins sur les États. Mais l’autre contrainte sur laquelle en fait la conférence s’est penchée sérieusement, et toutes les analyses faites aboutissent donc à cela, c’est des contraintes qui nous sont imposées de l’extérieur », a-t-il ajouté.
Les grandes décisions
A l’issue de la conférence, les pays africains ont réaffirmé leur détermination à mettre en œuvre au niveau national, continental et international toutes les mesures susceptibles de contribuer à la résolution effective de la crise de la dette actuelle.
Ils ont décidé de plaider en faveur de la réforme du Cadre commun du G20 en établissant une méthodologie universellement acceptée pour la comparabilité des traitements.
Les participants ont également réaffirmé leur « ferme engagement » à plaider en faveur de l’annulation de la dette, au cas par cas, en tenant compte de l’incapacité de certains pays africains à honorer le service de leur dette, en nous fondant sur les principes de justice économique, de nécessité ainsi que les principes du droit international.
Ils se sont également engagés à adopter une position africaine commune sur la dette sous l’égide de l’Union africaine, afin d’en faire une stratégie de négociation et de présenter un front uni face aux créanciers et autres parties prenantes lors des négociations et discussions relatives à l’annulation de la dette du continent, à sa restructuration et aux autres engagements de financement de la dette continentale.
Il faut également souligner l’appel des États africains à promouvoir l’appel en faveur d’une convention cadre des Nations unies sur la dette souveraine, ainsi que la création d’un organe onusien sur la dette souveraine plus représentatif et inclusif en matière de dette souveraine, afin de mettre en place un système à la fois équitable et transparent de résolution des crises de la dette.
Les pays ont par ailleurs estimé la nécessité d’harmoniser les politiques macroéconomiques régionales pour une plus grande résilience, en intensifiant l’intégration économique et en favorisant la convergence des cadres politiques, avec l’engagement à établir des cadres de stabilité monétaire et budgétaire adaptés aux priorités de développement, et en promouvant des politiques responsables, une gestion prudente de la dette et une stabilité monétaire au service de la croissance.
Ils ont en outre réaffirmé leurs engagement à poursuivre la mise en œuvre de mesures aux niveaux national, continental et mondial afin de veiller à ce que le continent mobilise des financements concessionnels adéquats pour la mise en œuvre de la transformation sociale et économique du continent sans compromettre la viabilité de la dette.
Un appel est également lancé à l’endroit des organisations internationales à reconnaitre la vétusté des outils actuels d’analyse et de gestion de la dette qui contraignent et freinent les investissements essentiels dans le capital humain, les infrastructures vitales et la résilience face aux défis globaux et à privilégier désormais le bon sens politique et stratégique à l’automatisme technique contre-productif.
Faure Gnassingbé, porte-voix sur la dette africaine
La conférence a confié au Président du Conseil de la République togolaise la mission de porter la voix de l’Afrique dans cette dynamique de sorte à parvenir à des mécanismes innovants pour une meilleure gestion de la dette africaine.
« La conférence a demandé à Son Excellence, M. Faure Essozimna GNASSINGBE Président du Conseil, de porter la question de la dette africaine, de sorte qu’avec l’Union africaine, qu’ils puissent demander que cette architecture internationale soit revue, que la question soit portée donc auprès de nos partenaires du G20, les partenaires institutionnels internationaux, FMI, Banque mondiale, de sorte que la question des coûts des crédits puisse être revue, en tout cas qu’on puisse revoir l’architecture financière internationale, de sorte que l’Afrique, pour se développer, puisse bénéficier de la dette, mais de la dette saine. La dette saine, la dette qui ne soit pas, disons, accordée à des coûts prohibitifs », a déclaré le ministre Barcola.
« Il nous faut avoir des ressources, mais des ressources concessionnelles. Et pour cela, il faudrait qu’on puisse revoir le mécanisme international de la dette. Voilà ce qu’on peut retenir de cette conférence, qui a donc bien voulu solliciter le président du conseil de la République togolaise pour porter cette question de la dette sur le plan africain, et de proposer donc des mécanismes innovants au niveau international pour permettre à l’Afrique tout entière de pouvoir se retrouver dans de meilleures conditions », a-t-il précisé.