Noël Koutéra BATAKA : « Pour multiplier ses atouts, le Togo a choisi d’investir dans des agropoles »

Dans une récente interview au site d’informations  http://www.54etats.com , le ministre togolais de l’agriculture, de la production animale et halieutique, est revenu sur le potentiel agricole du Togo, les efforts de transformation de l’agriculture togolaise avec certains instruments entre autres, le programme de développement des pôles de développement agricole, et le Mécanisme Incitatif de Financement Agricole  fondé sur le partage de risques (MIFA).

« Le gouvernement a choisi de concentrer la production sur des cultures à hautes valeurs ajoutées. Le choix a été fait en tenant compte des avantages compétitifs du Togo sur un certain nombre de filières par rapport à nos zones agro-écologiques qui sont assez diversifiées », a indiqué le ministre Noël Koutéra Bataka

Divers autres sujets ont été également abordés notamment les ambitions du Togo pour son secteur agricole et la politique des normes de qualités.

Nous vous proposons l’intégralité de l’interview :

Priscilla Wolmer : Le Togo couvre une superficie de 56 785 km2 pour 6,6 millions d’habitants. Il s’étire sur une bande étroite d’une longueur de près de 700 km pour 50 à 150 km de large.

Noël Koutéra BATAKA : Nous avons 3,6 millions de terres arables et seulement 45% sont actuellement mises en valeur. Le potentiel est énorme !

Il y a 60 % de terres agricoles ?

Tout à fait et elles ne sont pas totalement valorisées.

Le Togo a pour ambition d’accélérer sa croissance et de changer son parc industriel. Quels sont les objectifs à atteindre pour transformer le secteur agricole ?

Le Togo pour transformer son économie a choisi de concentrer ses investissements sur ses atouts naturels tels que le port autonome de Lomé. C’est l’unique port en eau profonde d’Afrique de l’Ouest (16,60 mètres). Le port du Togo peut accueillir des navires de 3ème génération ! C’est l’un des ports les plus compétitifs. Etant sur la côte ouest africaine, on peut atteindre plusieurs capitales en un seul jour avec un acheminement de marchandises. C’est un véritable atout.

Pour multiplier ses atouts, le Togo a choisi d’investir dans des agropoles.

C’est à dire ?

Les agropoles sont des ensembles d’entreprises circonscrites dans une aire géographique donnée, qui entretiennent des relations fonctionnelles dans leurs activités de production, de transformation, de services d’appui et de commercialisation d’un produit végétal, animal, halieutique ou forestier donné pour développer de la production à grande échelle, transformer et mettre sur le marché en utilisant le facteur compétitivité du port autonome de Lomé. En somme, la politique de mise en place des agropoles contribue dans un premier temps à la réduction de la pauvreté, principalement en milieu rural avec une réduction de plus de 15% dans les cinq prochaines années (de 68.7% à 53.7%), à la création d’emplois que les statisticiens évaluent à plus de 24.837 emplois dont près de 40% pour les femmes. D’autre part, elle contribue à la création de richesse en milieu rural et à la réduction du déficit de la balance commerciale agricole.

Le Togo a t-il pour ambition de devenir le premier hub logistique de la région CEDEAO ?

Le gouvernement ambitionne de transformer le pays en hub logistique. L’agriculture étant un secteur majeur du développement.

Tout d’abord, nous allons accentuer le développement des infrastructures, les secteurs connexes tels que les routes, dédoubler la route nationale numéro 1 pour en faire l’autoroute de l’unité pour la prospérité partagée comme le chef de l’Etat, Son Excellence Faure Gnassingbé l’a baptisé. Ensuite, nous allons valoriser les potentialités agricoles qui existent sur l’ensemble du territoire.

Comment comptez-vous faire pour que votre Produit National Brut gagne 4,5 points d’ici 2022 ?

Le gouvernement a choisi de concentrer la production sur des cultures à hautes valeurs ajoutées. Le choix a été fait en tenant compte des avantages compétitifs du Togo sur un certain nombre de filières par rapport à nos zones agro-écologiques qui sont assez diversifiées.

Des filières stratégiques ont été choisies comme le coton dans lequel le gouvernement veut atteindre au moins 200 000 tonnes d’ici 2022 ou encore le sésame où le pays ambitionne d’arriver à plus de 100 000 tonnes d’ici 4 ans. Le Togo souhaite doper sa production de café, cacao, soja et d’autres nouvelles cultures émergentes tels que l’ananas, les bananes plantains, les oranges afin d’ajouter de la valeur au niveau national dans la transformation, le conditionnement, le traitement sur le marché, et ainsi générer des revenus pour les petits producteurs.

Elle a rapporté en milieu rural 4 milliards de FCFA en ayant une production agricole de 137 000 tonnes. La relative bonne santé de la filière a permis d’ouvrir une 5usine d’égrenage à Blitta après celles de Notsè, d’Atakpamé, de Kara et de Dapaong. Le pays ambitionne produire dans le futur 200.000 tonnes annuels.

Quels sont les éléments financiers disponibles pour booster les investissements dans le secteur agricole ?

Le gouvernement a choisi d’innover avec la création d’agropoles sur 10 zones du territoire. Ces espaces verront naître des infrastructures logistiques qui faciliteront la mise en place de parcs agro-industriels (électrification, eaux, télécommunication) et pour cela, nous allons investir sur les infrastructures sur fond agro-public. Pour le premier agropole de Kara, la BAD et la BOAD nous soutiennent.

Par ailleurs, le gouvernement va amener les investisseurs, les opérateurs économiques à produire à grande échelle. Le président Faure Gnassingbé a également mis en place un mécanisme de financement fondé sur le partage de risques car les demandes de marché des industriels qui ont besoin de matières premières est importante.

Vos voisins, le Ghana et le Bénin semblent plus avancés sur la mécanisation du secteur agricole, comptez-vous investir dans l’achat de tracteurs ?

Le Togo a changé de paradigme. Il s’agit de créer les conditions pour l’opérateur privé qui veut développer la mécanisation et qui peut le faire, en structurant les petits producteurs en coopérative. Le gouvernement crée un marché solvable à travers la structuration des producteurs. C’est un marché gagnant pour les producteurs qui peuvent ainsi rembourser leurs équipements.

Un mot sur la mise en place des normes de qualités ?

Notre territoire étant réduit, nous avons ciblé les marchés de niche. Le gouvernement compte rehausser les standards pour les mettre au niveau international. Le Forum économique Togo-Union européenne a permis aux responsables qualités de l’Union européenne d’échanger avec l’ensemble des acteurs agricoles du pays mais aussi avec les opérateurs économiques.

Le Togo a eu recours à des investissements publics pour répondre aux objectifs de modernisation de son économie avec un accent sur la réhabilitation des infrastructures agricoles comme les laboratoires de technologie alimentaire et de recherche agronomique.

Nous comptons aussi accompagner les producteurs dans une démarche de conversion vers une agriculture biologique. On parle de 30 milliards de dollars pour le marché agriculture et pour les produits bio. C’est énorme.

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